Cette date est entrée dans l’histoire de la Mauritanie qu’on le veuille ou non et elle sera toujours associée à cette sinistre nuit où 28 prisonniers furent pendus pour commémorer le 30ième anniversaire du pays. La veille 28 personnes furent sélectionnées et numérotées de 1 à 28. L’exécution eut lieu dans cet ordre à partir de minuit. Je ne crois pas que les témoins de cette macabre scène, les familles des victimes et tout mauritanien qui condamnant cette barbarie puissent avoir, pour ce jour, la même considération que les commanditaires de cette immolation et leurs sympathisants. Cet anniversaire ne symbolisera désormais plus que les massacres d’Inal. On ne pourra rien y changer. Pour moi c’est tout le mois de novembre qui est douleur; chaque jour me rappelle un tortionnaire, un bourreau, un ami disparu ou un moment de souffrance.

 

FLAMNET : Merci d´avoir accordé cette interview à FLAMNET. Tout d’abord, voulez-vous vous présenter à nos lecteurs?

Mahamadou SY : Je suis né à Bélinabé à quelques kilomètres de Kaëdi, dans le sud de la Mauritanie. J’ai quitté très tôt le cocon familial pour les études coraniques. J’avais cinq ans quand mes parents m’envoyèrent à Médina Gounass, loin de mon environnement familial. Je n’ai été à l’école qu’à l’âge de dix ans. L’établissement, composé uniquement de deux classes, portait le nom de « l’école Battoir » et se situait à l’îlot G, pas loin de l’abattoir- d’où d’ailleurs a été tiré son nom. C’est dans ces deux classes que j’ai eu à être témoin du premier choc communautaire en 1966. Mon adolescence s’est passée dans les quartiers de Nouakchott. En 1978, j’ai décidé d’aller à l’armée, à l’EMIA d’Atar. Après une formation d’officier, j’ai occupé des postes d’instructeur et de commandement jusqu’à mon arrestation.

Pourquoi avez-vous décidé d´écrire ce livre-témoignage et pourquoi ce titre « L’ENFER D´INAL »?

Je commencerai par la fin de la question, à savoir le titre. Je l’ai choisi parce que j’y étais et que l’enfer tel qu’on le décrit y ressemble beaucoup. La couverture aussi je l’ai voulue ainsi, une Mauritanie qui brûle avec les visages aux regards interrogateurs de quelques de victimes au milieu, justement de cet enfer. La décision d’écrire L’ENFER D´INAL a été prise alors même que j’étais encore prisonnier à Inal. Ceux parmi mes compagnons qui ont survécu à la tourmente se souviendront sûrement que je m’étais proposé alors de lui donner comme titre « J’étais officier. A ce moment, aucun d’entre nous ne savait s’il allait en sortir vivant. Je crois que ce n’était qu’une envie de raconter l’horreur vécue. Mais beaucoup plus que cela aujourd’hui, il s’agit, pour moi :

  • D’exorciser un passé que le pouvoir mauritanien croit avoir réussi à enfouir à jamais.
  • De mettre à nu ce système qui nous a conduits dans cette impasse.
  • De rendre un hommage mérité à ces morts.
  • De séparer le bon grain de l’ivraie, les Maures ne sont tous coupables même si le silence de la large majorité était complice. Il y’a eu ces Maures qui arrivaient le coffre de la voiture rempli de denrées alimentaires destinées aux Négro-Mauritaniens que le pouvoir s’apprêtait à déporter. De cela aussi j’ai été témoin.

Ce livre est aussi une contribution à une quête de justice et d’égalité. Je souhaiterais que chacun, juriste, politique ou tout simplement lecteur averti puisse y trouver les armes nécessaires pour une Mauritanie réconciliée et débarrassée de ses démons.

Que s’est-il passé exactement à Inal pendant ces purges ou « dénégrification » qui ne dit pas son nom ?

  Ce qui s’est passé à Inal en 90 est tout simplement innommable. Des hommes ont été arrêtés de façon la plus lâche. Ils ont été regroupés à Inal dans le seul but d’une extermination. Il s’agissait, d’abord, de les soumettre à la torture la plus barbare possible, ensuite seulement, leur faire dire n’importe quoi. Le capitaine Sidina n’a-t-il pas un jour tenu ces propos à ses sbires : « ne tuez pas ceux-là, j’en ai encore besoin, ils n’ont rien dit pour le moment ». Il parlait de prisonniers fraîchement débarqués. Cela résume à lui seul la haine aveugle et le sombre dessein qui nous attendaient tous. C’était effectivement une purge ethnique. Les tortionnaires et bourreaux étaient tous des Maures ou Haratin et les victimes, des Négro-Mauritaniens. Il n’y avait pas l’ombre d’un motif autre que leur appartenance ethnique.

 Les arrestations de 90-91 vous ont-elles surpris ?

A ma connaissance, rien ne justifiait mon arrestation. Il y avait, certes, une rumeur qui faisait état de l’arrestation de deux officiers dont un ami d’enfance. Aussi, étais-je loin, lorsque j’ai été arrêté, d’imaginer les véritables intentions des commanditaires.

D´aucuns estiment que les militaires négro-africains arrêtés en 90-91 ont été victimes de leur naïveté, ils n’auraient tiré aucune leçon des évènements de 87, que leur répondez-vous ?

Il faut, à mon avis, essayer de se situer dans le contexte de ces années et vivre la situation de l’intérieur de l’armée pour pouvoir se faire une idée objective. L’affaire de 87 et celle de 90 ne sont pas comparables. Dans la première, il y’avait un motif d’arrestation, une tentative de renversement du régime en place. Ce qui ne justifie pas les sentences rendues par la cour spéciale de justice qui a jugé l’affaire. Pour ce qui est de 90, il n’y avait absolument rien à la base de ces arrestations-là. D’autre part, aujourd’hui l’histoire nous montre que les peuples sont les plus aptes à conduire aux véritables changements. Penser que les militaires pouvaient changer quoi que ce soit relève d’une autre naïveté. Ils étaient complètement déresponsabilisés. Les rares postes qu’ils occupaient étaient tout simplement symboliques. Tout était fait de sorte qu’ils ne puissent prendre aucune décision sans avis supérieur. La plupart du temps, ils n’avaient qu’un véhicule de commandement et un camion de ravitaillement, dans le meilleur des cas. Mais comme je l’ai dit plus haut, c’est toute la Mauritanie, la communauté négro-mauritanienne y comprise, qui est responsable par sa passivité. Trois officiers ont été tués arbitrairement sans que cela ne soulève aucune réaction de la communauté et encre moins du reste de la Mauritanie. Ils étaient certes des militaires, mais avant tout des Négro-Mauritaniens. Il faut qu’on arrête de penser que seuls les militaires sont en mesure d’apporter de véritables changements à nos problèmes.

 Pouvez-vous revenir pour nos lecteurs sur cette horrible nuit de 28 novembre 90 à Inal, en tant que rescapé et témoin de cette haine bestiale et qu´entendez-vous de cette affirmation, quand vous dites dans votre livre « plus jamais cette date n´aura la même signification pour les mauritaniens »?

Cette date est entrée dans l’histoire de la Mauritanie qu’on le veuille ou non et elle sera toujours associée à cette sinistre nuit où 28 prisonniers furent pendus pour commémorer le 30ième anniversaire du pays. La veille 28 personnes furent sélectionnées et numérotées de 1 à 28. L’exécution eut lieu dans cet ordre à partir de minuit. Je ne crois pas que les témoins de cette macabre scène, les familles des victimes et tout mauritanien qui condamnant cette barbarie puissent avoir, pour ce jour, la même considération que les commanditaires de cette immolation et leurs sympathisants. Cet anniversaire ne symbolisera désormais plus que les massacres d’Inal. On ne pourra rien y changer. Pour moi c’est tout le mois de novembre qui est douleur; chaque jour me rappelle un tortionnaire, un bourreau, un ami disparu ou un moment de souffrance. Aujourd’hui, 23 novembre 2000, me ramène à mon camion en compagnie de Kane Mohamed Mansour, feu le lieutenant Sall Abdoulaye Moussa et feu le lieutenant Anne Dahirou. A cette heure précise de l’année 90 nous étions chacun derrière une voiture ; ce jour fut également pour moi un autre anniversaire car je suis né un 22 novembre.

Vous écrivez aussi dans votre livre « la réaction de Taya ne surprend que ceux qui ne connaissent pas son passé, en effet, certains se souviennent encore du cas de Sakho dans les années 60, Ould Taya n´était qu´un sous-lieutenant à l´époque, il n´a sûrement pas oublié, lui ». Pouvez-vous nous rafraîchir la mémoire sur cette affaire ?

Cela remonte en décembre 60 ou début 61. Monsieur Sakho Mamadou Lamine était alors administrateur à Néma. Un commando s’en est pris à Sakho et un français. Tous deux furent tués. Les membres de ce commando appartenant à l’escadron commandé par Ould Taya, seront jugés et passés par les armes. Pour le Sanctionner, sans doute, Taya aurait été désigné pour commander lui-même le peloton d’exécution. Qui était derrière ces hommes ? Une chose est certaine, Taya n’était pas loin. Petit bourreau a tout simplement grandi.

Le pouvoir a longtemps essayé de présenter la tragédie que vous avez vécue comme étant l´œuvre de seconds couteaux, quelques petites bavures, « personne n’a été tué de sang-froid » dixit Taya dans le Monde, pensez-vous, vous qui connaissez l´armée de l´intérieur que les évènements d´une telle ampleur et d´une gravité aient pu avoir lieu sans le feu vert du colonel-président?

Taya peut dire ce que bon lui semble mais nous ne le laisserons pas pervertir la réalité. Il a d’abord nié puis prétendu qu’il n’était pas au courant ce qui pour moi relève d’une incompétence sans comparaison et une inaptitude à occuper les fonctions qui étaient les siennes : ministre de la défense, Président du CMSN et chef d’état. Comment expliquer la promotion fulgurante des plus zélés des tortionnaires ? Le chef d’état-major n’a-t-il pas nommé ministre de la défense juste après cela ? Sidi ould Néma, le bourreau de Sorimalé, n’a-t-il pas été décoré par Taya lui-même ? Pourquoi Ould Boïlil a-t-il été envoyé pour faire l’école d’état-major juste après Inal ? Pourquoi a-t-il fait des mains et des pieds pour voler au secours d’Ely ould Dah, un autre tortionnaire et bourreau de Jreïda et d’Azlatt ? Il n’a pas hésité à rompre la coopération militaire avec la France dans cette dernière affaire, allant même jusqu’à chercher d’autres alliés qui seraient éventuellement moins regardant dans ses dossiers sensibles. Cette opération de nettoyage ethnique n’a pas pu se faire sans sa bénédiction. Il en est le premier responsable.

Le pouvoir s’évertue à faire en sorte que les évènements de 89-91 soient oubliés, que faites-vous en tant que victimes afin qu´ils demeurent à jamais gravés dans la mémoire de notre peuple? Êtes-vous favorable comme certains l´ont suggéré à la construction d´un mémorial du souvenir pour nos martyrs?

Le travail de mémoire n’a pas commencé avec « l’enfer d’Inal ». Il y’a eu avant cela « J’étais à Oualata » de Boye Alassane en 1999 et beaucoup plus loin « Notre part de vérité » Que nous, 17 officiers rescapés survivants des massacres de 1990, avons rédigé au moment de notre radiation de l’armée en 1991. Dans ce document, nous relations le calvaire vécu et exigions une commission indépendante d’enquête, une sanction des responsables des massacres, une réparation du préjudice subi par les victimes et une indemnisation des veuves et orphelins. Ce document a été remis à toutes les ambassades et ONG présentes à Nouakchott et à tous les dirigeants politiques de l’époque. Ils ne peuvent pas dire qu’ils n’ont pas été informés. Je salue au passage le travail fait par le CSDM à travers leur document de 1993. Il y’a eu aussi un article paru dans le Journal « l’Unité » dans lequel je racontais l’enfer d’Inal en plus condensé. Le combat contre l’oubli a toujours été pour moi, comme pour tous les rescapés, une préoccupation majeure. Pour ce qui est de construire un mémorial pour nos martyrs, je trouve que c’est une excellente idée. J’avais même lu, avec beaucoup de plaisir, sur le net une proposition qui visait à donner leurs noms à des rues et des établissements scolaires. Ce serait le meilleur moyen de réhabiliter leurs mémoires. Et puis, on leur doit bien cela. Ces balbutiements de démocratie c’est à eux que nous les devons.

Que pensez-vous de ceux qui disent que les activistes négro-mauritaniens tendent à légitimer la propagande de « victimisation », une sorte de « judaisation » du problème noir, de sorte à étouffer d´autres questions sociales aussi urgentes qui touchent toutes les composantes nationales du pays?

De toute façon, suis-je tenté de leur répondre, ce qui s’est passé en Mauritanie n’est comparable dans son fond et dans sa forme qu’à l’holocauste. Notre cas ne peut être assimilé ni au Rwanda, ni au Libéria, ni à l’Afrique du Sud où l’ANC était structurée et disposait d’une aile militaire, pas même à la Palestine, dont je compatis à la douleur, qui en plus de son armée, a ses poseurs de bombes et ses lanceurs de pierres. En Mauritanie, qui peut dire qu’il a reçu un jet de pierres de la part d’une seule de ces personnes qui ont été massacrées à Inal et ailleurs dans le pays? Comme pour les juifs auxquels le pouvoir a pris beaucoup de plaisir à assimiler tout Négro-Mauritanien, il s’agissait d’arrêter des hommes sans armes sur leur lieu de travail ou à leur domicile dans le seul et unique but de les liquider. Mais il me semble aujourd’hui que le mot juif a perdu un peu de son sens péjoratif dans les sphères de la direction nationale.

 Vous avez été arrêté en 90 et accusé injustement d´être un agent des liaisons des Flam au sein de l´armée sans connaître auparavant ce mouvement, consideriez-vous comme certains que les Flam étaient les « principaux responsables de vos malheurs » ou pensez-vous que cette accusation était seulement une manoeuvre dilatoire pour justifier l´epuration ?

J’ai effectivement été accusé d’appartenir à une cellule militaire des FLAM. Ce qui était complètement faux, il n’y avait pas d’aile militaire des Flam. La première fois que j’ai rencontré un membre de ce mouvement c’est en 1993, en France. Je n’ai pas été le seul à faire l’objet de cette accusation. Dans ces moments de souffrance, on en veut toujours à « celui qui vous a dénoncé » ou « celui pour qui vous êtes torturé » surtout si vous ne savez rien de ce dernier ni pourquoi vous êtes là. Il était de bon ton, à l’époque, de cataloguer les personnes dont on voulait se débarrasser. Taya a cherché un dérivatif pour asseoir son pouvoir. Le phénomène « FLAM » a été intentionnellement amplifié pour les besoins de la répression. Pour le militaire moyen qu’est le colonel, il faut en permanence se trouver un ennemi pour exister.

Que pensez-vous justement des Flam, de leur combat et de leur parcours, reconnaissez-vous vous en tant que négro-mauritanien dans leur lutte contre le racisme et la dictature en Mauritanie?

Je retrouve la quasi-totalité de mes revendications dans les ambitions des Flam. Il est des points sur lesquels nos vues divergent, par exemple, le fédéralisme ou la séparation. Je rêve d’une Mauritanie unie, une fois pour toute. C’est d’ailleurs ce que j’ai voulu ressortir dans la quatrième de couverture de mon livre, par l’illustration de ma photo face à ce pays. Cette unité n’a, en vérité jamais existée vraiment. La méfiance a toujours été présente. Mais la cohabitation, je crois que c’est le terme juste, n’a jamais été aussi malmenée qu’avec Ould Taya. Quant au parcours des Flam, je le respecte. Elles jouent le rôle qui est le sien, j’apprécie beaucoup son ouverture.

 Taya vous arrête injustement, vous torture, vous massacre, déporte et ensuite vous accorde sa « grâce » à l’ occasion de la fin du mois de Ramadan, comme si cela ne suffisait pas il vote une autre loi d´auto-amnistie ou amnistie pour ses bras armés! Que vous inspirent cet acte et cette « mansuétude » du colonel-président?

Je n’ai jamais compris cette expression « …le président vous a pardonné ». On sait aujourd’hui que Taya ne pardonne jamais, il recule devant l’inévitable. Il y avait eu d’énormes pressions exercées sur lui au moment où son ami et frère Moussa Balla Traoré était balayé par un souffle nouveau. Ayant compris qu’il fallait au moins faire semblant de suivre cette vague de démocratie qui déferlait sur le continent ; il ne pouvait faire autrement que renoncer au projet qui consistait à justifier la mort des centaines de militaires dans les camps par l’exécution officielle d’autres qui devaient passer devant un tribunal. Il convient de souligner que jusqu’à la veille du jour retenu pour le jugement pas un seul prisonnier n’avait vu d’avocat. Donc je disais qu’il a eu d’énormes pressions. La France de Mitterrand a joué un rôle décisif dans ce « pardon » par le biais de Michel Vausel.

Qu´est-ce qui doit être entrepris selon vous au plan politique, institutionnel et juridique pour que les évènements tels que ceux de 86-91 ne puissent plus jamais se répéter? Pensez-vous que le règlement du seul passif humanitaire comme l´appellent pudiquement certains peut suffire pour ramener la confiance et réconcilier les mauritaniens?

Je pense que politiquement l’équipe en place aujourd’hui n’est pas apte à négocier des solutions. Voilà 16 ans que cela dure, c’est à dire depuis l’arrivée de Taya à la tête de l’état. Les responsables de ces violations des droits humains sont encore là et exercent toujours avec plus de responsabilités. Ils ont toujours cette arme qui leur a permis d’accomplir leur sale besogne : le pouvoir. Et tant que cet outil est entre leurs mains on ne peut être sûr qu’ils ne recommenceront pas une fois que l’occasion leur sera propice. N’avions-nous pas failli replonger dans l’horreur en juin dernier ? Le pouvoir a tout fait pour déclencher un affrontement avec le Sénégal. De 19. 000 sénégalais recensés, on passe en une semaine à plus de 300.000 (la différence des négro-mauritaniens à déporter ou à tuer). On n’ose pas imaginer quel en aurait été le chiffre au bout d’un mois. Fort heureusement le peuple ayant tiré la conclusion sur les événements de 1990 a refusé la confrontation. Je pense que le malaise social ne se limite pas seulement à une procédure électorale. Au-delà de Taya et sa horde, il y a tout un système qu’il faut combattre ; son départ à lui tout seul ne saurait régler la crise identitaire des populations D’autre part, il faudra abolir de façon effective cet esclavage et entreprendre une véritable politique d’insertion des haratin. C’est à mon avis cette pratique qui, en grande partie, a servi de catalyseur aux événements tragiques que nous avons connus.

 Dans une contribution sur Flamnet vous semblez être étonné de la ferveur combattante de certains mauritaniens quand il s´agit des problèmes des autres alors qu´ils sont passifs sur leur propre problème, pouvez-vous vous expliquer davantage?

Je trouve en effet regrettable de constater que pour nos politiciens, de façon générale, consacre plus d’énergie quand il s’agit de palestiniens ou de n’importe qui d’autre qu’aux véritables problèmes du pays. Cet état d’esprit est malheureusement largement partagé dans certains milieux. J’ai l’amère impression d’être tout juste toléré dans mon propre pays. Nous avons nos fosses communes, nos martyrs, nos déportés et nos esclaves. Pour moi, ce sont là des motifs suffisants pour renverser ce régime dictatorial. Les relations extérieures du pays passent après l’unité nationale. Jusque-là, je n’ai pas vu un seul dirigeant d’un parti descendre dans la rue pour demander le retour des déportés, l’abolition de l’esclavage, une indemnisation des veuves et orphelins et encore moins la traduction des bourreaux en justice.

Votre dernier mot à nos lecteurs et aux mauritaniens?

Je m’adresserai plutôt au Président de la république : « Mon colonel, vous avez fait beaucoup de tort à ce pays. Le peuple n’a connu sous votre règne que souffrance, déportations, tortures humiliations, massacres, marginalisation, perpétuation de l’esclavage et isolement politique. Qu’avez-vous fait de ma Mauritanie ? Un océan de ruines, une terre de désolations et un désert de larmes. Les hommes que vous avez tués ont laissé des veuves et des orphelins. Vous arrive-t-il de penser à ses derniers ? Ils aimaient eux aussi leurs pères comme Ahmed Ould Taya a aimé le sien. Mon colonel, partez, vous leur devez bien cela. »

Novembre 2000. 

 

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