Les terres de la vallée du Sénégal : Question nationale et enjeux fonciers

 

En Mauritanie, la sécheresse qui avait duré de 1967 à 1993 et la progression de la désertification dans le Sahel subsaharien ont modifié considérablement l’écologie au détriment des économies traditionnelles et de l’occupation de l’espace. Leurs effets replacent aujourd’hui les zones d’eau (les bassins du fleuve Sénégal et de ses affluents le Xaaraxooro et le Gorgol situés sur la rive mauritanienne) et de pâturages dans des enjeux économiques de plus en plus importants.

Un phénomène qui n’est cependant pas nouveau dans l’histoire des territoires du Bassin moyen du Sénégal. Les terres du waalo (partie du lit majeur submergée par la crue annuelle) et celles du jeeri  (ensemble des terres bordières toujours exondées sur lesquelles sont pratiquées des cultures pluviales) représentent encore un potentiel économique important, capable de nourrir une population de près de 2 000 000 de personnes occupant le bassin du fleuve Sénégal et répartie entre le Mali, la Mauritanie et le Sénégal. Il suffit d’exploiter avec une utilisation intelligente l’eau et la terre. Ce que n’arrive pas à faire la Mauritanie qui a l’imprudence politique d’associer les intérêts socio-économiques de ses populations à des préoccupations d’ordre idéologique qui ont ainsi favorisé l’installation  d’une crise endémique qui la fragilise et qui menace son existence. Cette situation  donne à la question posée et qui est l’objet de ce colloque toute sa légitimité dans le cadre des pays du bassin du fleuve Sénégal.

Cadre de l’étude

Cadre géographique

Avec une superficie de 1.030 000 Km2, le territoire de la République islamique de Mauritanie est situé dans la partie nord-ouest de l’Afrique, entre les zones sahélienne dans le sud et le sud-est, saharienne dans le reste du pays. A l’ouest, sur la façade atlantique, il s’étend du Cap Blanc à l’embouchure du Sénégal. Il est limité au nord-ouest par le Sahara occidental, au nord-est par la République d’Algérie, à l’est et au sud-est par la République du Mali, au sud et au sud-ouest par la République du Sénégal avec lequel la Mauritanie partage les territoires de la moyenne vallée du fleuve du même nom et qui est la partie la plus sensible du bassin du Sénégal du fait des intérêts économiques et politiques qu’elle représente.

Populations

Sa population musulmane à 100% est estimée entre 2.300.000 et 2.500.000 habitants. Comme tous les autres pays africains hérités des constructions coloniales, l’espace politique et administratif de la Mauritanie est un assemblage de morceaux de territoires très hétérogènes qui appartenaient à des Etats nationaux précoloniaux dont les pays avaient été conquis militairement par le colonialisme français. C’est pourquoi on retrouve de part et d’autre de ses frontières des populations appartenant aux mêmes  ethnies  éclatées entre ses pays voisins. Ainsi, sur sa frontière du sud elle partage ses populations wolof et Fulɓe (ou HaalPulareeɓe)  et H’râtîn (Basse vallée du Sénégal), Fulɓe (ou HaalPulareeɓe) et Sooninko (Moyenne vallée) avec la République du Sénégal. Sur celle du sud-est, elle partage ses populations Sooninko, Fulɓe (ou HaalPulareeɓe)  et Bambana (Haut-Sénégal) avec les Républiques du Sénégal et du Mali. Elle partage sa population arabo-berbère composée de Bîdhân et  de H’râtîn[1] avec le Mali (Est), l’Algérie (Nord-est) et le Sahara occidental (Nord-ouest).

La Mauritanie reste un des pays les plus pauvres du monde avec un p.n.b. inférieur à 300 dollars. Le développement de son économie moderne reste limité à la pêche maritime et aux industries extractives (fer et cuivre dans le nord-ouest). Les importants gisements de gypse (nord-ouest) et de phosphate (moyenne vallée du Sénégal) sont très peu exploités. Le secteur rural demeure potentiellement le secteur le plus important de l’économie, car il occupe près de 65% de la population totale, même s’il ne représente aujourd’hui que 19% du p.i.b.

Le territoire de Mauritanie occupe une pénéplaine aux deux tiers saharienne. Seule la zone sahélienne occupée par le bassin moyen et la région deltaïque du Sénégal  (le seul cours d’eau permanent qui existe dans le pays) bénéficie de pluies plus fréquentes. La vallée alluviale comprise entre le Fallemme (un des principaux affluents) et l’Atlantique a toujours représenté un intérêt économique important grâce à ses terres de culture et à ses pâturages. L’économie traditionnelle agro-pastorale permet de pratiquer des cultures céréalières de décrue et pluviales (variétés de sorgho-Sorghum-bicolor L, de mil-Pennisetum glaucum et maïs-Zea mays L) dans les bassins du Sénégal et de ses affluents, et de la phéniculture dans les oasis situées dans le centre et le nord du pays. Depuis une quarantaine d’années a été introduite sur les terres de décrue du Sénégal la riziculture de type asiatique dans de petits périmètres irrigués pour chercher à supprimer le déficit céréalier du fait de la sécheresse. L’intérêt de l’agriculture irriguée a augmenté depuis que la nouvelle bourgeoisie arabo-berbère a commencé à y investir ses capitaux il y a une quinzaine d’années.

Malgré sa grande richesse en cheptel (bovins, ovins, caprins, camelins, assins), l’élevage reste aujourd’hui très handicapé par le rétrécissement des superficies des pâturages. Pendant la saison sèche qui dure environ 9 mois, la quasi-totalité du cheptel mauritanien reste concentré dans la vallée du Sénégal, donc dans des territoires de plus en plus réduits où une cohabitation entre éleveurs et agro-pasteurs ne peut être viable que s’il existe un respect consensuel des règles bien établies de production et d’exploitation.

Le fleuve Sénégal et ses potentialités hydro-agricoles.

Le Mali, la Mauritanie et le Sénégal, dans le cadre de l’Organisation pour la mise en valeur du Fleuve Sénégal (O.m.v.S.) cherchent depuis 1972 à résoudre le problème de déficit économique par une exploitation de toutes les potentialités hydro-agricoles. Cet organisme sous-régional  a en charge le développement des pays du bassin du fleuve Sénégal, y compris la construction et la gestion des deux barrages :

– Celui de Manantali sur le Bafing. Situé à quelques 1000 km en amont au Mali ce barrage constitue un réservoir de 22 milliards de mètres cubes d’eau. Achevé en 1988 il est prévu pour la régulation du débit dans la moyenne vallée afin de réaliser trois objectifs :

* générer 800 gigawatt-heure/an d’énergie hydroélectrique pour alimenter en électricité les trois pays, mais particulièrement la Mauritanie et le Sénégal ;

* permettre une double culture irriguée sur 405 000 ha de terres cultivables dont

240 000 pour le Sénégal, 156 000 pour le Mali et 109 000 pour la Mauritanie. Ceci permettrait aux populations de la vallée de pratiquer jusqu’à deux récoltes par an auxquelles il faut ajouter une troisième, celle des  cultures pluviales du jeeri ;

* permettre la navigabilité permanente du fleuve entre Saint-Louis à l’embouchure et Kayes au Mali.

– Le barrage de Jama (achevé en 1985) est  situé à 27 km de l’embouchure. Sa fonction est d’empêcher la remontée des eaux salées de l’océan Atlantique constatée jusqu’environ 200 km à l’intérieur du fleuve en période des basses eaux. Avec la construction d’une digue sur la rive mauritanienne, le barrage permet d’élever le niveau de l’eau douce  pour une irrigation plus importante des terres de la basse vallée.

Depuis une trentaine d’années, la lente mais progressive descente des populations venues du nord et du centre de la Mauritanie vivant exclusivement de l’agriculture et de l’élevage est difficilement ressentie par les autochtones du sud comme des menaces d’ordre économique, culturelle et physique pour une région qui se caractérise par l’exiguïté de ses superficies «utiles »[2] qui formaient déjà, avant la sécheresse, un fragile équilibre entre ses habitants, entre cultures et bétail. Au départ, les relations conflictuelles entre agro-pasteurs et nomades intéressaient en réalité très peu le pouvoir politique de Nouakchott. On peut dire que c’est à partir de 1979-80 que celui-ci intégra réellement ce que le colonisateur français avait qualifié d’«espace utile» (vallée du Sénégal) dans le débat de ce qu’on appelle en Mauritanie la Question nationale et qui oppose du point de vue idéologique et racial les Noirs non arabes (Sooninko, Bamana, Wolof et Fulɓe) aux Arabo-berbère.

Pour une meilleure compréhension de notre propos, il est utile de faire un bref rappel historique du contexte politique et idéologique que la Mauritanie avait hérité à son indépendance et qui a été entretenu depuis lors par les héritiers politico-administratifs du pouvoir colonial français après 1960.

Le fondement colonial de «la Question nationale» (1899-1960)

La question identitaire dans le discours politique en Mauritanie est quelque chose de relativement ancien. On peut même dire qu’elle naquit avec la colonie. En effet, dès sa création théorique  (décembre 1899), les coloniaux français avaient introduit le débat sur l’identité raciale et ethnique de la future colonie à créer. On parlait alors de créer un «espace unitaire maure »[3] et de créer une Mauritanie dont les principes fondamentaux devraient reposer sur les «(…) facteurs de l’unité culturelle maure et saharienne »[4]. Les débats identitaires commencèrent à prendre une véritable importance politique à partir de 1958, avec une série de publications, dans la presse de Dakar au  Sénégal et dans celle de Paris en France, de déclarations de dirigeants appartenant respectivement aux deux tendances nationalistes négro-africaine et arabe.

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La volonté de confier la direction politique du pays sur des considérations raciales et ethniques, la conviction acquise par les dirigeants Bidan que la Mauritanie est une « colonie ethnique maure », les prises de position des Noirs contre cette perception politique des choses, tout cela constituait un ensemble de facteurs psychologiques peu favorables à un avenir politique stable en Mauritanie. C’est dans ce contexte de suspicions et de querelles culturelles entre dirigeants des entités ethnico-raciales que la colonie accéda à l’indépendance en novembre 1960. Les dirigeants politiques noirs souhaitaient que leur «communauté raciale » restât arrimée au Mali et au Sénégal, tandis que les Bîdhân voulaient être rattachés au monde arabe auquel ils s’identifient. Les déclarations de politiques racistes et chauvines des uns, les mises au point politiques des autres donnèrent d’emblée le ton des aspirations très contradictoires qui préfiguraient des lendemains difficiles pour le pays.

Le renforcement de la politique d’arabisation par l’éducation, perçue comme un moyen d’organiser l’hégémonie de la nationalité bîdhân, joua le rôle de catalyseur dans les crises raciales et ethniques cycliques qui opposent les deux parties depuis 1960. Les premiers affrontements raciaux sanglants qui secouèrent le pays eurent lieu en février 1966, après la promulgation des lois 65 025 et 65 026 du mois de janvier 1965 rendant de manière insidieuse la langue arabe obligatoire dans l’enseignement primaire et secondaire.

Thèse ethniciste et politique d’arabisation.

Cette politique d’hégémonie ethnico-raciale est justifiée dans la  construction d’une argumentation historique qui lie intimement l’espace (la Mauritanie assimilée au Trab-el-Bîdhân, le «Pays des Bîdhân») à l’ethnie (arabo-berbère), et la race («blanche») d’où la résurgence de la thèse développée à l ‘époque coloniale : Faire de la Mauritanie un «espace unitaire maure ».

Du point de vue de cette construction idéologique qui est devenue une idéologie d’Etat, la rive droite du fleuve Sénégal fait partie intégrante de «l’espace arabe » qui a été occupée par des populations non arabes à la faveur de la colonisation, d’où la thèse de la «Teera Nullis »qui veut que ce territoire qui forme aujourd’hui la Mauritanie était vide de peuplement humain avant l’arrivée des Arabes Beni Hassan à la fin du XVIème siècle[5]. Dans son numéro 129 du mois d’avril 1969, le mensuel Watan al Arabi développait des théories sur la pureté raciale de l’«espace mauritanien» dans lequel doit vivre l’«homo mauritanicus » identifié à l’Arabe. Des photos de Bîdhân (hommes «blancs ») et de Bîdhâniya (femmes «blanches ») sont produites dans ce numéro avec des légendes précisant que ces hommes et ces femmes «blancs» représentaient l’ «authentique » population de la Mauritanie à vocation «arabo-musulmane ». Toujours dans le même numéro, sont publiées des photos des pirogues remplies de Noirs  traversant le fleuve Sénégal. On lance alors un appel pour que ce morceau de la «patrie arabe » (Watan al Arabi), la Mauritanie, sauvegarde sa «pureté arabe » face à cette  «al ihtilal al zounji » («invasion noire ». La Mauritanie est alors assimilée à la Palestine, d’où l’appellation de «Seconde Palestine » qu’on lui donne. Les Bîdhân, sont désignés par cette idéologie sous le vocable de «Palestiniens » et les Noirs non arabes vivant dans le pays de «Juifs» qu’il faut refouler sur la rive sénégalaise.

Il faut préciser que la circulation d’une rive à l’autre du fleuve Sénégal est une chose normale car, malgré l’existence de cette frontière artificielle créée entre les colonies du Sénégal et de la Mauritanie par le décret du 25 février 1905, ce fleuve n’a jamais été une frontière pour les populations autochtones vivant à cheval sur les deux rives, encore moins un élément de rupture. Le Sénégal et son bassin forment une entité géographique (terres du waalo, terres du jeeri) qui ont permis à leurs habitants d’élaborer au fil des temps une socio-économie fondée sur l’agriculture, l’élevage et la pêche. La création de cette frontière artificielle au milieu d’une unité géographique homogène a favorisé le dysfonctionnement de ce mode d’organisation socio-économique. Ces activités au quotidien d’une rive à l’autre qui durent depuis des siècles, donc bien avant l’arrivée des Européens en Afrique, sont donc assimilées aujourd’hui par une idéologie à une invasion de la Mauritanie par des populations noires. Rappelons que la Mauritanie a été créée par le colonisateur français d’abord sur le papier le 29 décembre 1899 et constituée sous sa forme actuelle avec intégration de la rive droite à partir d’un arrêté du  10 avril 1904[6].

Cette thèse a justifié l’action politique des campagnes de dépopulations des Noirs non arabes de la vallée par des campagnes d’expulsions des soi-disant Noirs étrangers  et de massacres de  d’autres civils et militaires noirs entre 1989 et 1990.

L’application de cette thèse dans la politique foncière.

Si cette thèse n’a pas trouvé son application pratique déjà dans les années soixante c’est parce qu’un dispositif administratif et militaire capable d’organiser une dépopulation n’était pas encore mis en place. D’ailleurs, le régime en exercice de l’époque, celui de Mokhtar Ould Daddah (28 novembre 1960-10 juillet 1978), même s’il appliquait systématiquement la politique d’ethnicisation de l’Etat en vue d’une hégémonie politique, culturelle et économique totale des Arabo-berbère, n’avait pas montré une volonté de pratiquer une politique d’épuration ethnique par une dépopulation de la rive mauritanienne de ses Fulɓe (ou HaalPulareeɓe), Wolof et Sooninko. La prise du pouvoir par les militaires le 10 juillet 1978 favorise une mise en place progressive d’un dispositif d’application d’une épuration ethnique. La conjonction de trois facteurs favorables se présente entre 1979 et 1983. Elle permet l’application de la politique de dépossession des terres et de dépopulation des Noirs (Fulɓe ou HaalPulareeɓe, Sooninko et Wolof) de la vallée du Sénégal :

– Le premier facteur touche à l’aggravation de la sécheresse et ses conséquences sur l’exode des nomades arabo-berbère et leurs importants troupeaux de dromadaires dans la vallée, et la sédentarisation de certains. A partir de 1979-1980, les conflits deviennent de plus de plus fréquents et violents entre agro-pasteurs noirs et propriétaires Bidan de dromadaires qui provoquent des dégâts importants des cultures[7]. Ici, la carte arabe a été appliquée à fond par le régime de Nouakchott. Ainsi en 1982 à Ouad Naga, le colonel Mohamed Khouna Ould Haïdallah, alors président du comité militaire de Salut national (C.m.s.n./mai 1980-décembre 1984), incite les familles nomades et sédentaires bidhân et h’râtîn vivant dans la région administrative d’Aleg et touchées par la sécheresse à migrer vers la vallée du Sénégal « (…) la sécheresse a tout détruit. Il n’y a plus d’eau dans nos puits, plus de pâturages pour le bétail. Allez dans le Sud, vous y trouverez de l’eau et de la terre pour cultiver (…)». Son successeur, l’actuel Président, le colonel Ould Taya ira plus loin dans cette option lors de sa visite officielle au Gidimaxa, dans le sud-est, au début de l’année 1987. Répondant aux doléances d’une délégation des agriculteurs sooninko qui avaient réclamé une protection de leurs cultures contre les dégâts impunis causés par les troupeaux de dromadaires, le gouverneur de cette région administrative, Dah Ould Abdel Jelil, l’actuel ministre de l’intérieur, des Postes et Télécommunications, avait répondu à la place du président que « (….) les dromadaires étaient aussi mauritaniens que les villageois de la vallée du Sénégal. Ces animaux avaient donc le droit de venir s’abreuver au fleuve comme les agriculteurs avaient le droit de cultiver leurs terres (…)».

– Le second facteur déterminant est la politique d’investissements entreprise dans l’agriculture irriguée rentière par la nouvelle bourgeoisie politico-administrative et militaire bîdhân sur les terres du fleuve. Entre 1977 et 1978, une campagne contre l’O.m.v.S fut menée par les nationalistes arabo-berbères qui s’évertuèrent à démontrer que la Mauritanie n’avait aucun intérêt économique et politique à rester membre de cette organisation. Cette revendication entre dans le cadre de la politique d’orientation intégrale vers le monde arabe qui veut que la Mauritanie se désolidarise de tous les organismes de développement sous-régionaux subsahariens[8]. Un revirement est observé à partir de novembre 1979 pour tenir le nouvel argument selon lequel les Arabo-berbère doivent bénéficier au même titre que les populations de la vallée des aménagements d’infrastructures hydroélectriques de l’O.m.v.S. Du point de vue de ces nationalistes, cette revendication trouve une seconde légitimité dans le fait que les principaux pays qui financent les barrages sont des pays arabes, l’Arabie Saoudite, le Koweït, Abou Dhabi. Viennent seulement ensuite la France, l’Allemagne, l’Italie, le Canada, les Etats Unis et les organismes internationaux comme le F.e.d., la B.a.d., le P.n.u.d. Cet argument fut déterminant dans la prise de décision sur la réforme foncière.

– Le troisième facteur touche à l’esclavage. La question sur cette  institution, son abolition en 1981 et surtout sa politisation par les H’râtîn-Abîd qui ont décidé de prendre en main leur destin socio-économique et politique constituent une menace réelle pour le Système Bîdhân qui construit et qui gère l’hégémonie ethnique arabo-berbère. C’est pourquoi il évite toute contradiction antagoniste qui affaiblirait son bloc ethnique dans le combat qu’il prétend lui faire mener contre le bloc multiethnique non arabophone. En effet, la clientèle communautaire H’râtîn-Abîd arabophone représente dans ce conflit ethnico-racial qui divise la Mauritanie un enjeu militaire important. Car les descendants d’esclaves sont devenus un instrument militaire dont il a été démontré l’efficacité meurtrière dans la répression lors des conflits raciaux de février 1966. Ils ont confirmé ce rôle lors de la crise d’avril-juin 1989 à Nouakchott, et lors des massacres des militaires noirs non arabophones entre novembre et décembre 1990. Les initiateurs de la campagne trouvèrent donc dans les revendications sociales et politiques de El Hor, un mouvement de cadres et d’intellectuels H’râtîn-Abîd crée en mars 1978, une opportunité pour donner à la campagne en faveur d’une réforme foncière une légitimité encore plus grande.. « La terre à ceux qui la travaillent » fut un slogan largement diffusé par le Système Bidan qui, appuyé sincèrement par les courants de la gauche marxiste-léniniste et maoïste mauritanienne toutes ethnies confondues, fit miroiter les terres de la vallée aux masses H’râtîn-Abîd et à leurs dirigeants politiques. Cette campagne sociale plutôt démagogique qui a fini par montrer son caractère pernicieux et très dangereux visait en réalité à orienter les légitimes et irréversibles revendications sociales et économiques des H’râtîn-Abîd  vers les terres alluviales du Sénégal afin de susciter des contradictions antagonistes entre cette communauté et les populations non arabophones de la vallée.

 

Face à toutes ces pressions politiques et sociales, le gouvernement du colonel Mohamed Khouna Ould Haydallah  promulgua donc l’ordonnance n°83 127 du 5 juin 1983 portant réorganisation foncière et domaniale. Cette « réforme foncière » n’a touché, jusqu’à présent, que les terres de la vallée du Sénégal, objet des convoitises de l’agro-busness et qui représentent la majeure partie des surfaces aménageables indispensables à l’autosuffisance alimentaire du pays. En effet, paradoxalement, les importantes terres des oasis et des graara dans le Trab-el-Bîdhân ne sont nullement touchées par l’application de cette réforme. Les articles 1, 3, 9, 11, 12 et 14  de l’ordonnance de 1983 favorisent jusqu’à aujourd’hui des confiscations «légalisées » des terres. La circulaire n° 020/MINT du 29/07/85 intitulée «circulaire spéciale relative à la campagne agricole », adressée par le ministre de l’intérieur aux gouverneurs et préfets permet «l’achat des terres» par la classe d’affaires bîdhân issue de la bourgeoisie formée des trois composantes compradore, politico-administrative et militaire. Cette politique de confiscation des terres est facilitée par la réforme de l’administration territoriale entièrement arabisée instaurée depuis le régime de Mokhtar Ould Daddah et dont le commandement (gouverneurs et adjoints, préfets et sous-préfets) dans les quatre régions du fleuve est exclusivement réservé à des administrateurs arabo-berbères. Les confiscations des terres étaient faites sous la protection de la Garde nationale et de l’armée nationale et du Corps de la police qui répriment les révoltes des populations spoliées de leurs terres de culture, malgré les protestations des groupes lignagers propriétaires traditionnels des terres de culture, car dans la vallée du Sénégal, la propriété individuelle n’existe pas dans le mode de gestion et d’exploitation des terres et du bétail[9]. Pour donner à ces confiscations une apparence de légitimité, le gouvernement accorde des autorisations d’exploiter des terres à titre précaire et révocable, mais cette procédure est la voie classique par laquelle l’Etat permet de régulariser l’occupation après une mise en valeur intempestive de la propriété (décret n°90.020 du 31 janvier 1990).

Le 11 septembre 1991, un sit-in des habitants agro-pasteurs des villages de Sinycu-Deyba et de Sinycu-Bummaka dans leur plaine alluviale de MBargu  se termina  par un massacre. Une fusillade fit 3 villageois tués et 4 autres grièvement blessés par balles tirées par des éléments d’un détachement de la Garde nationale venu protéger, sur ordre du préfet, une famille Bîdhân à qui le gouverneur de Kayhayɗi avait attribué des terres qui appartenaient à ces deux  villages. Cette forme d’appropriation par des particuliers est devenue classique depuis les premières campagnes agricoles qui suivirent la réforme de 1983. Aucun village de la vallée, qu’il soit habité par des Wolof, des Fulɓe (ou HaalPulareeɓe), des Sooninko,  même les Adouaba des H’râtîn-Abîd dont certaines sont installées dans la vallée depuis le début du siècle à l’occasion de la politique d’allégement des conditions d’esclavage menée par l’administration coloniale n’échappent à ces dépossessions «légalisées».

Le Waalo-Barak (départements et arrondissements,  depuis Kër Maseen Seen  jusqu’à Kër Muur) est le premier pays touché. Dans sa progression vers l’est du fleuve, la politique d’occupation des terres de culture par des hommes d’affaire entraîne une nouvelle forme d’occupation, la colonisation.

Le Fuuta Tooro (arrondissements de Teekaan, de Wuro Elimaan (Dar-el-Barka), département de Ɓoggee, de Bahbaalɓe, MBaany, de Kayhayɗi, de Magaama) et le Gidimaxa (région administrative du Gidimaxa) sont de plus en plus touchés.  Les dernières campagnes de confiscations des terres suivies de répression des villageois propriétaires ont eu lieu dans les provinces du Tooro (arrondissement de Dar-el-Barka) en juin 2000 et du Hirnaange Boosoya à Beelinaaɓe (Département de Kayhayɗi) en août 2000. Comme d’habitude, pour contrer les populations de la vallée, gouverneurs, préfets, sous-préfets, chefs d’arrondissements exigent aux agro-pasteurs des titres fonciers pour prouver leurs droits sur les terres de leurs ancêtres[10]. On exige donc aux paysans de la vallée du Sénégal ce que les membres de la société bîdhân sont eux-mêmes incapables de fournir.

L’application de cette politique de confiscation des terres à partir de 1987 a placé le bassin moyen du Sénégal dans une situation de crise endémique grave qui touche l’ensemble des populations vivant sur les deux rives.  Car toutes les familles d’agriculteurs qui appartiennent aux mêmes parentèles que celles installées sur la rive mauritanienne et ayant la nationalité sénégalaise (parce que toutes ces populations ont été sénégalisées ou mauritanisées par l’administration coloniale française) ont vu confisquer leurs terres qu’elles possédaient depuis des siècles, bien avant les invasions arabo-islamistes, donc bien avant l’arrivée des Européens dans la vallée du Sénégal.

Ce conflit qui oppose le régime de Nouakchott aux intérêts des Noirs non arabes de Mauritanie d’une part, à ceux du Sénégal d’autre part atteignit son paroxysme en avril-juillet 1989. On déplore des centaines de morts dans les deux pays. Cette crise de 1989 donna l’occasion au régime de Nouakchott de réaliser sa première campagne de purification ethnico-raciale en faisant « expulser » massivement vers le Sénégal et le Mali près de 120 000 Noirs, particulièrement des agriculteurs et des pasteurs après confiscations de leurs terres et leurs milliers de têtes de bétail. Des villages entiers furent dépeuplés pour être repeuplés ensuite par des familles H’râtîn-Abîd dont quelques-unes bénéficièrent d’une redistribution de quelques lopins des terres et de quelques têtes du bétail confisqués.

Cependant, la part importante des terres confisquées a été redistribuée à des hommes d’affaires. On distribua le bétail à des familles Bîdhân installées récemment sur les hautes terres la vallée du fait de la sécheresse.  Dans le cadre de la campagne de modification de l’occupation de l’espace ethnique les villages sont aujourd’hui rebaptisés avec des noms arabes et occupés par des familles Bîdhân ou H’ratîn. C’est ce que constate d’ailleurs l’Agence française de développement quand il  écrit : « Le fleuve Sénégal : la rive mauritanienne en voie de colonisation : sur la rive mauritanienne du Sénégal habitée traditionnellement par les Noirs, les Maures blancs ont afflué et créé de nouveaux villages. Depuis la réforme foncière domaniale et foncière de 1983, des milliers d’hectares leur ont été attribués. Ils ont aussi pris en main l’administration et certains conseils municipaux. L’amertume est grande chez les autochtones qui ont l’impression de vivre une nouvelle colonisation »[11].

Cette situation interne en Mauritanie est compliquée par les rapports complexes que ce pays entretient avec le régime sénégalais d’une part,  les populations de la vallée appartenant aux mêmes ethnies que celles de la rive mauritanienne d’autre part. Depuis la crise de 1989, la Mauritanie continue d’ignorer systématiquement les droits des Sénégalais riverains du fleuve et propriétaires de terres situées sur la rive droite. Les autorités administratives locales continuent de confisquer leurs terres, en violation du droit privé international. Face à cette situation les populations sénégalaises concernées accusent les gouvernements du Sénégal qui se succèdent de faire preuve de laxisme qui amène des observateurs à les soupçonner de complicité avec le Système Bîdhân, malgré leur menace de saisir la Cour Internationale de Justice. En effet, certains pensent que le lobby wolof de la confrérie musulmane des Mourides dont l’actuel président, Abdoulaye Wade, est un fervent disciple, cherche à faire appliquer la même politique que les Bîdhân sur les terres de la rive gauche. Les Mourides avaient fait une première tentative en 1994 dans le département de Podoor, sous le régime d’Abdou Diouf qui avait fait marche arrière face à une menace de conflit ethnique entre Fulɓe (ou HaalPulareeɓe) et Wolof disciples du Mouridisme. Les terres de la rive gauche sénégalaise  étant elles aussi très convoitées par de puissants lobbies d’affaires mourides originaires des régions centrale et côtière de la République du Sénégal, on se demande quelle sera l’attitude du nouveau régime du Sénégal élu au mois de mars dernier, face à une possible coalition  entre le lobby ethnico-religieux mouride wolof du Sénégal et les hommes d’affaires Bîdhân de Mauritanie. La façon dont les gouvernements des deux pays contrôlés politiquement et idéologiquement par ces deux ethnies ont aménagé une résolution de la crise de mai-juin dernier autour du projet hydraulique interne du Sénégal[12], le silence politique du Sénégal sur l’impunité du racisme d’Etat, les déportations et les massacres des Noirs en Mauritanie ont renforcé les doutes sur le régime sénégalais soupçonné de collusion avec le Système Bîdhân qu’il prétend pourtant combattre.

En tout cas, face à ces crises politiques qui opposent la Mauritanie et le Sénégal, l’O.m.v.S. a enregistré des retards importants dans l’exécution de son programme initial. Ces crises pèsent lourdement sur son fonctionnement. Elles hypothèquent l’avenir de la coopération entre les trois Etats, et peuvent remettre en cause à tout moment les principes fondamentaux qui avaient conduit les trois à se regrouper en vue de mettre en valeur toutes les potentialités économiques de ce fleuve qui les unit. La Mauritanie a joué souvent le rôle d’empêcheur de tourner en rond. Elle a toujours été dirigée par des régimes politiques qui n’ont jamais fait mystère de leurs préoccupations premières, une arabisation exclusive du pays, refusant par conséquent de s’installer dans des réalités géographiques, historiques et socio-culturelles dans lesquelles le pays a été tracé. Les préoccupations de ses directions politiques n’ont rien à voir avec celles auxquelles se représentent au quotidien les populations du bassin moyen du Sénégal qui ne cherchent qu’à rentabiliser les potentialités économiques de ce fleuve. Cette absence d’unité d’intérêts se traduit souvent par leur politique d’absentéisme à l’occasion des réunions des chefs d’Etat membres. Après la C.e.d.e.A.o., les analystes de la géopolitique des pays de l’Afrique de l’ouest s’attendent à ce que ses dirigeants satisfassent aux revendications politiques des nationalistes exclusivistes qui formulées depuis les années 70, à savoir le départ de la Mauritanie de l’O.m.v.S.[13]. En cas de départ du pays de cette organisation sous régionale, les conséquences ne seront pas seulement économiques. Elle accélérera le processus des conflits ethniques et raciaux malheureusement  inévitables mis en conditions favorables par le Système Bîdhân depuis l’application subjective de la réforme foncière et domaniale. Ces conflits auxquels aucun des pays de la sous-région ne sera à l’abri remettront inévitablement en cause l’entité de la géographie politique et administrative de la Mauritanie.

Conclusion

En Mauritanie, il apparaît que la question de partage des terres de culture et des pâturages au bénéfice des populations rurales touchées par la sécheresse et la désertification n’est pas une préoccupation primordiale, même si on installe ces populations aux premières loges pour justifier la politique d’appropriation en cours d’exécution. Ici, l’eau et la terre sont devenues des instruments de réalisation  d’un programme qui était d’abord  politique et idéologique, puis économique. En effet, dans le champs d’une opposition entre les populations agro-pastorales et nomades dont les intérêts économiques sont très souvent divergents, mais pas antinomiques, les régimes du Système Bîdhân favorisent l’implantation sur la rive mauritanienne d’une agriculture rentière de spéculation qui bénéficie au lobby d’affaires Bîdhân, d’où la coalition entre celui-ci et le nationalisme Bidan qui a toujours cherché dans le contrôle des territoires du Sud à réaliser son programme  d ‘ «homogénéisation culturelle et ethnique arabe de la Mauritanie».

Face à cette situation difficile et inquiétante nous nous permettons de reprendre la question posée et la conclusion pessimiste suivantes de l’anthropologue Bernard CROUSSE qui avait effectué en 1992 une mission dans la vallée du Sénégal  pour le compte de la Banque mondiale : «A quand des solutions satisfaisantes pour tous les partenaires en présence ? Manifestement l’horizon est bouché et on ne voit pas approcher les éclaircies bienfaisantes attendues(…)»[14]. Chacune a toute sa légitimité.

Bibliographie

Travaux universitaires

-BA, Yaghoub Aboubacry : «Les problèmes fonciers et le développement agricole au Gorgol», Mémoire de fin d’études, Ecole nationale d’Administration, Nouakchott, 1986.

-BARO, Mamadou Amadou : «Contribution à une étude socio-économique d’expériences d’aménagements hydro-agricoles en Mauritanie. Cas du périmètre pilote du Gorgol». Mémoire, Faculté des lettres et sciences humaines, Université de Dakar, 1984.

-NDIAYE, Abou Souleymane : «Les  problèmes du secteur rural en Mauritanie et ses projets ruraux dans le cadre du IVè Plan», Mémoire de maîtrise. Faculté du droit, Université de Dakar, 1983.

-NDIAYE, Yéro : «Périmètres irrigués et coopératives villageoises de la région du Gorgol», Mémoire de fin d’études, Ecole nationale supérieure, Nouakchott, 1983.

-OULD DIH, Cheikh : «Incidence de la culture irriguée sur la situation socio-économique des populations de la rive droite du fleuve Sénégal», Ecole nationale supérieure agronomique de Montpellier, 1983

-YALL, Zakaria : «L’organisation de la propriété foncière et domaniale en Mauritanie», Mémoire de fin d’études, Ecole Nationale d’Administration, Nouakchott, 1985.

Ouvrages

-ADAMS, Adrian : «La terre et les gens du fleuve : jalons, balises», Paris, l’Harmattan, 1985.

-ALOVO-KANE, Henriette : «La sécheresse en Mauritanie. Un dossier d’information», UNICEF, 1984

-BOUTILLER, Jean-Louis : « La Moyenne vallée du Sénégal. Etude socio-économique« , Paris, Presses Universitaires de France, 1962.

-De CHASSEY, F. : «L’Etrier, la houe et le livre : Les sociétés traditionnelles au Sahara et au Sahel», Paris, Anthropos, 1977.

-lam, Aboubakry Moussa. : «La fièvre de la terre», Paris, L’Harmattan, 1991.

-lam, Abuubakry Muusa : «Paalel Njuumri», Dakar, Editions Papyrus-Gie, 2000. 220 p. O.M.V.S. (Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal) : « Etudes socio-économiques du bassin du fleuve Sénégal« . 4 parties. Réédition 1984. Parie 1 : Présentation générale du bassin du fleuve.

-SALEM-MURDOCK, Muneera ; HOROWITZ, Michael M. : « Les barrages de la controverse. Le cas de la vallée du Sénégal« , Paris, L’Harmattan, 1994. 318 p.

Articles

-BECKER, Charles, LERICOLLAIS, André : « Le problème frontalier dans le conflit sénégalo-mauritanien », Politique Africaine, n°35, octobre 1989, pp. 149-155

-BOUTILLER, Jean-Louis & SCHMITZ, Jean : « Gestion traditionnelle des terres ‘système de décrue/système pluvial) et transition vers l’irrigation : le cas de la Vallée du Sénégal

-BOUTILLER, Jean-Louis : « , Paris, Cahiers des Sciences humaines, XXIII (3-4), 1987, pp. 533-544.

-CROUSSE, Bernard : «Etatisation ou individualisation. La réforme foncière mauritanienne de 1983», Paris, Politique Africaine, N° 21, mars 1986, pp. 63-76.

-CROUSSE, Bernard. «Logique traditionnelle et logique d’Etat. Conflits de pratiques et de stratégies foncières : le cas de Mbagne,», in CROUSE, Bernard., LE BRIS, et LE ROY, Etienne (dir.), «Espaces disputés en Afrique noire. Pratiques foncières locales», Paris, Karthala, 1986, pp. 199-217.

-CROUSSE, Bernard. : «La Mauritanie, le foncier et l’après-barrage», Paris, Politique Africaine, n° 30, juin 1988, pp. 83-88.

-CROUSSE, Bernard et HESSELING, Gerti : « Transformation foncière dans la vallée du Sénégal. Enjeux politiques et ethniques », Paris, Politique Africaine, N° 55, «Mauritanie, un tournant démocratique», octobre 1994, pp. 89-100

-GADEN, Henri : «Du régime des terres de la vallée du Sénégal au Fouta, antérieurement à l’occupation française», Paris, Bulletin du Comité d’Etudes Historiques et Scientifiques (BCEHS), AOF, n°4, 1935, t 18 (XVIII), pp. : 403-414, mises au point et rectification de l’article paru dans le Bul. Com. Af. 1911, rens. Col. , p. 246.

-GUEYE, Youssouf : « Essai sur les causes et conséquences de la micro-propriété au Fouta-Toro », Dakar, BIFAN, B.t.XIX, n°1-2, 1957, pp. 28-42.

-KOITA, Tidiane : « Migrations, pouvoirs locaux et enjeux sur l’espace urbain » Transformations foncières dans la vallée du Sénégal. Enjeux politiques et ethniques », Paris, Politique Africaine, N° 55, «Mauritanie, un tournant démocratique», octobre 1994, pp.101-109

-PARK, T.K. ; BARO, Mamadou ; NGAÏDE, Tidjane : « Les conflits fonciers et la crise du nationalisme en Mauritanie », Madison-Wisconsin, Land Tenure Center, 1991, 54 p.

-SECK, Sidi Mohamed : « Bassin du fleuve Sénégal, aspects fonciers et organisationnels dans le développement de la culture irriguée», OMVS, 1985.

-TOUPET, Charles : «L’eau et l’espace au Sahel : l’exemple de la Mauritanie», Revue de géographie de Lyon, 1983/3.

-VIDAL, André : « Etude sur la tenure des terres indigènes au Fouta », CEHSAOF, tome 18, n°4, oct-déc. 1935, pp. 415-448.

-WANE, Mamadou : « Réflexions sur le droit de la terre des Toucouleurs ». BIFAN. t. 42. Série B. n° 1. 1980 paru le 30 novembre 1981.

 

Annexes

-Ordonnance n°81 234 du 9 novembre 1981 portant abolition de l’esclavage en République Islamique de Mauritanie

– Ordonnance n°83-127 du 5 juin 1983. Journal officiel de la République Islamique de Mauritanie, 25è année, 592-593, 25 juin 1983, pp. 364-366.

– Circulaire n°020/MINT du 20/07/85 intitulée «circulaire spéciale relative à la campagne agricole » adressée par le ministre de l’Intérieur aux gouverneurs et préfets.

– Décret 90-020 du 31 janvier 1990 abrogeant et remplaçant le décret n° 84-009 du 19 janvier 1984 portant application de l’ordonnance  n°83-127 du 5 juin 1983, Journal officiel de la République islamique de Mauritanie du 28 février 1990 pp. 364-366.

– Arrêté n° R 181/IMRD du 17 novembre 1986 portant création d’un Bureau des Affaires foncières et de législation rurale.

– Circulaire n° 023/MIPT/CM/MV du 26 août 1990 à Monsieur le Wali du Trarza et Messieurs les hakems des Moughataa de Rkiz et de Rosso relative à l’attribution de terrains à usage agricole.

– Arrêté n° R  206  du 5 novembre 1990 fixant les attributions des services en matière de politique foncière dans le secteur rural, Journal officiel de la république islamique de Mauritanie du 28 novembre 1990.

– Création d’un Bureau foncier à Rosso en 1991

– Création d’un Bureau foncier à Kaédi en 1993


[1] Cette Communauté est composée de deux sous-ensembles, les H’râtîn proprement dits qui sont des descendants d’esclaves et les Abîd qui sont en encore soumis au régime d’esclavage bien que celui-ci ait été supprimé en Mauritanie par une ordonnance n°81 234 du 9 novembre 1981.

Parmi les H’râtîn on distingue sans lisibilité :

-Les Adhab : qui seraient des descendants des populations autochtones, les Bafuur, qui ont été assimilés à la Culture arabo-berbère, sans aucun lien avec l’esclavage. On prend l’exemple des  Imragen (les pêcheurs) sur les côtes de la Mauritanie

-Les Khâdra qui sont d’anciens esclaves libérés qu’on assimile aussi à des descendants des Bafuur assimilés. Ils restent très attachés à leurs anciens maîtres. Ils sont généralement assez aisés mais sont toujours surtaxés par les  Bîdhân (Maures « blancs » qui, de cette façon, allègent leurs propres taxes

Voir :

L’Autre Afrique  du 6 août au 2 septembre 1998 : «Mauritanie. Interview de Messaoud Ould Boulkheir». pp.24-26

– SOS Esclaves Mauritanie. Rapport annuel 2000. Quatrième rapport. 38 p.

[2] GUEYE, Youssouf : « Essai sur les causes et conséquences de la micro-propriété au Fouta-Toro », Dakar, BIFAN, B.t.XIX, n°1-2, 1957, pp : 28-42.

[3]MARTY, Paul : « Considérations sur l’unité des pays maures de l’Afrique occidentale française», in Annuaires et Mémoires du CEHS/AOF, série B, 1916, pp.262-270.

[4] MARTY, Paul : « Considérations ….. ». op. cit.

[5]Thèse reprise le 31 juillet dernier par un des dirigeants nationalistes Bîdhân Ahmed El Waffi invité par la télévision privée qatariote Al JAZEERA dans l’émission « Dayfoun wa quadhyah » qui  captée dans le monde entier

[6] ANS (Archives Nationales du Sénégal). 9G 21. Pièce 106

[7]Le dromadaire provoque aujourd’hui dans la vallée des destructions importantes sur les cultures, destructions contre lesquels personne n’ose porter plainte de peur de subir les foudres de l’administration civile et militaire locale dont les agents se solidarisent avec cet animal pour des raisons socio-économiques (car le dromadaire représente chez les Bîdhân ce que la vache représente chez les Fulɓe (HaalPulareeɓe) et aussi, dans le contexte de la Question Nationale, à cause de cette compétition ethnique pour le contrôle économique des terres de la vallée. Cette situation provoque souvent des conséquences psychologiques assez graves chez les populations agro-pastorales de la vallée du Sénégal. Le dromadaire concurrence beaucoup les bovins, les ovins et les caprins pour les pâturages. Une des principales demandes formulées par les communes du Sud jumelées à leurs homologues françaises est l’installation de clôtures électriques de protection contre les dromadaires.

Voir l’article « Dans le Sud mauritanien, Dieu ne tue pas les chameaux ! » in  FLAMBEAU. Bulletin trimestriel n°19. Janvier-février-mars 2000. P.10.

[8] En application de cette politique, la Mauritanie a quitté le 26 décembre 1999 la CEDEAO (Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) dont elle est membre fondatrice.

[9]GUEYE, Youssouf : «Essai sur les causes et conséquences de la micropropriété au Fouta-Toro», Dakar, BIFAN, B.t.XIX, n°1-2, 1957, pp : 28-42.

[10]GADEN, Henri : «Du régime des terres de la vallée du Sénégal au Fouta, antérieurement à l’occupation française», Paris, Bulletin du Comité d’Etudes Historiques et Scientifiques (BCEHS), AOF, n°4, 1935, t 18 (XVIII), pp : 403-414, mises au point et rectification de l’article paru dans le Bul. Com. Af. 1911, rens. Col. P. 246.

[11] L’Agence française de développement. Pressdoc Numéro 588 16-22 octobre 2000 citée par Afrique Agriculture du mois d’octobre 2000.

[12]D’après des études, il  ressort que chaque année, le fleuve Sénégal perd près de 10 milliards de mètres cubes d’eau qui se versent en mer, au niveau du barrage de Diama. Ces mètres cubes d’eau n’étant pas valorisés, la Mission d’études et d’aménagement des vallées fossiles (M.e.a.v.f.)), une structure d’études sénégalaise propose de lancer en 1994 le programme de revitalisation des vallées fossiles (P.r.v.f.) d’ici à l’an 2000. L’objectif final étant de prélever une partie de ces excédents d’eau afin de l’utiliser pour le développement du Sénégal qui doit passer nécessairement par celui de l’agriculture irriguée et par l’élevage sédentarisé. La réalisation du P.r.v.f  nécessite un budget de 30 milliards de francs C.f.a.. La vallée fossile couvre une zone comprise entre le Sine-Saloum qui est un bras de mer estuaire et le fleuve Sénégal. Elle se compose de six vallées individualisées dont celles du Ferlo (1200 km), du Sine (200 km), du Carcar (300 km), du Sandougou (360 km). Parmi ces vallées, celles du Sine et du Saloum devront, pour leur revitalisation, tirer leur eau des affluents du Haut-Ferlo qui sera revitalisé par une prise sur le Fallemme, affluent du Sénégal. En plus de faire venir l’eau sur un parcours de près de 3000 km, la M.e.a.v.f. devrait mener «(…) des actions curatives de revitalisation des vallées (…) et de leurs principaux affluents et défluents », «(…) des opérations visant la prévention d’une fossilisation des cours d’eau au sud du pays ». Ces actions permettront ainsi une sécurisation de la mise en valeur de l’ensemble du réseau hydrographique du Sénégal. Elles intègrent aussi la construction d’ouvrages contre la salinisation. La Mauritanie s’oppose à ce projet en arguant d’un manque d’eau du côté des défluents qui serait dû à la mise en œuvre de la première phase du projet de revitalisation des vallées fossiles, d’où la crise dite des vallées fossiles de mai-juin dernier qui faillit replonger la sous-région dans un conflit aux conséquences incalculables, 10 ans après celui de 1989.

[13] Durant ces années, l’Irak, puis la Libye s’étaient portés candidats pour réaliser des aménagements agricoles sur la rive mauritanienne. Le premier pays ne fit aucune réalisation. Le second créa avec la Mauritanie une structure dénommée So.ma.li.d.a. (Société mauritano-libyenne de développement agricole) à qui on attribua des ha de terres dans le Waalo (région administrative du Trarza) et qui n’a présenté jusqu’à aujourd’hui aucune incidence agro-économique favorable aux populations. .

[14]CROUSSE, Bernard et HESSELING, Gerti : « Transformations foncières dans la vallée du Sénégal. Enjeux politiques et ethniques », Paris, Politique Africaine, N° 55, «Mauritanie, un tournant démocratique», octobre 1994, pp.89-100, p.100.

Ibrahima Abou SALL

Colloque du 24 au 26 octobre 2000

Université Léopold  Sédar SENGHOR

(Alexandrie-Egypte)

 

 

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