Cheikh Aly Ridha Essa3idi, un nom à rallonge désormais rattaché à la plus grande escroquerie que connut la Mauritanie dans sa courte histoire. Mais, contrairement à Bernard Madoff (auteur d’une escroquerie du même genre en 2008 et, depuis, en prison) qui l’a devancé dans cet exercice, Cheikh Ridha n’a jamais été inquiété et bénéficie d’une impunité active adossée à une évidente complicité de la part des plus hautes autorités de l’Etat mauritanien.

Dans un enregistrement audio suivi par une conférence de presse de l’un de ses lieutenants (Aly Ould Dawla, voir photo), Cheikh Ridha vient de reconnaitre une dette de plus de 72 milliards d’ouguiyas (environ 240 millions de dollars) contractée auprès de victimes mauritaniennes allant du simple éleveur au propriétaire foncier en passant par le simple épargnant ayant construit, brique après brique, sa résidence principale et dont il se retrouve expulsé après qu’elle ait été vendue par les limiers de Ridha. Une vague promesse de remboursement a été émise par le Cheikh qui invoque, pour justifier sa banqueroute, les exigences démesurées et déraisonnables de certains de ses proches auxquels il ne pouvait refuser ce service (on pense très fort à Aziz).
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Son fondé de pouvoir, Ould Dawla, précise, quant à lui, que les créanciers seraient dédommagés quand les négociations en cours avec des investisseurs chinois auront abouti. Ces négociations ont pour objet la cession du permis d’exploitation, tombé curieusement entre les mains de Cheikh Ridha, des mines de phosphate découvertes depuis plusieurs années dans le sud de la Mauritanie (Bofal) et qui constituent l’une des plus importantes richesses du pays.

Comment l’Etat mauritanien, passé champion dans le domaine du recouvrement des créances (impôts et taxes) et qui en fait une arme imparable, notamment contre les opposants au pouvoir, a-t-il pu laisser un particulier (même pas constitué en société) brasser des milliards et des milliards sans le moindre impôts ou taxes?

Comment Cheikh Ridha est-il arrivé à pousser des milliers de Mauritaniens vers la ruine en leur faisant miroiter des gains faramineux par l’achat, à crédit, de leur biens à des prix exorbitants et en revendant ces derniers à des prix en dessous de ceux du marché? De la sorte, il ruine à la fois ses créanciers et les opérateurs du marché du foncier.

Quels sont les liens entre le président Aziz, Cheikh Ridha, Mohyiddine Ould Ahmed Saleck dit « Sahraoui » et Zein El Abidine Ould Mohamed Mahmoud? Qui finance qui et avec quel argent? Y’aurait-il des liens entre la transaction du Nouvel Aéroport remportée par Sahraoui, l’ascension économique et sociale fulgurante de Cheikh Ridha, la percée dans le mondes des banques de Zeine El Abidine, l’émission d’une nouvelle monnaie en Mauritanie, l’organisation de la faillite des sociétés publiques telles ATTM, ENER et SONIMEX et le renoncement à un troisième mandat de la part de Aziz?

Depuis deux semaines, nous recevons, à l’OBAMA (Observatoire des Biens et Avoirs Mal Acquis), une somme d’informations que nous nous proposons de compiler dans cet article, sans prétendre pouvoir répondre à toutes les questions posées.

La supernova    

La première fois que Cheikh Ridha fit parler de lui c’était sous le CMJD (Comité Militaire pour la Justice et la Démocratie) qui prit le pouvoir pour mener la transition en Mauritanie à la suite du coup d’Etat contre Sid’Ahmed Taya en 2005. Ridha acceptait d’intercéder au profit de la famille Cheibany (riche famille d’origine mauritanienne installée, depuis des générations, en Arabie Saoudite) auprès des nouveaux maîtres du pays.

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L’un des membres de cette famille, Mohamed Said Ould Cheibany, cherchait à récupérer les droits sur une vaste réserve foncière d’une dizaine d’hectare (voir image Google) idéalement située entre la Capitale et le Ksar et que l’ancien dictateur avait gelée après l’avoir octroyée aux Cheibany contre la promesse, non tenue, d’y ériger un complexe d’hôtels et d’infrastructures de loisirs. On aperçoit sur l’image le terrain presque nu en 2005 et le même terrain valorisé en 2018. La densité d’immeubles et de luxueuses habitations qui l’occupent en dit long sur la plus-value réalisée par ses heureux propriétaires.

Suite à cette intervention, Cheikh Ridha récupéra le tiers du dit terrain alors qu’un deuxième tiers finissait dans l’escarcelle des hauts gradés du CMJD dont feu Ely Ould Mohamed Vall et celui qui n’était que le Colonel Aziz. Les Cheibany s’en tireront avec le dernier tiers du terrain.

A cette première prise, Cheikh Ridha ajoutera un autre grand terrain octroyé par intervention de Aziz à la sortie de Nouakchott en direction de Nouadhibou, près du carrefour dit de la « théière ». Devenu l’un des hommes les plus riches de Nouakchott, Cheikh Ridha se devait de construire son aura d’érudit et de guide spirituel. Ayant établi, à l’occasion de multiples séjours en Egypte, une prétendue filiation avec la tribu des Sa3idiyine (haute Egypte), Ridha se pose en spécialiste de la Roukhya (art de guérison inspiré de pratiques attribuées au Prophète Mohamed, PSSL) et créa trois Mahadra (Ecole coranique) à différents coins de Nouakchott. L’apogée de cette ascension cultuelle sera atteint quand Cheikh Ridha guérira d’une attaque d’hépatite l’autre étoile montante de la Azizie, à savoir Sahraoui.

Cheikh Ridha, enrichi jusqu’à l’indigestion par ses relations au sein des plus hautes sphères de l’Etat et auréolé de sa couronne de guérisseur, Marabout de la Première Dame, « Chrif » et érudit servira plus tard au régime de Aziz comme bras armé en théologie capable de canaliser dans la direction souhaitée les sentiments religieux au sein de la population. La démonstration la plus spectaculaire de la force de ce bras fut l’irruption du Mouvement Nousra (les Amis du Prophète) instrumentalisé lors de l’affaire de Ould Mkheityr, accusé de blasphème et condamné à mort en première instance. Après avoir chauffé à blanc la rue mauritanien en réclamant la tête de Ould Mkeitir, l’opinion publique découvrait, au profit d’enregistrements audio fuités, la nature purement mercantile des principaux acteurs de Nousra et, en même temps, que ce mouvement était profondément vermoulu par les différentes officines de renseignement de Ould Abdel Aziz.

Le troc de l’aéroport

L’idée de construire un nouvel aéroport en dehors de l’agglomération Nouakchottoise est vielle d’au moins 30 ans. Des négociations avaient été entamées avec les Chinois qui acceptaient de se faire payer en minerai de fer mauritanien. Prétextant que le prix du minerai de fer avait, entre-temps doublé, Aziz demanda à renégocier le contrat puis décida de le dénoncer pour lancer l’une des opérations les plus opaques et juteuse pour lui et son entourage taillé sur mesure.

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Il troqua les 400 ha de foncier urbain qu’occupait l’ancien Aéroport International de Nouakchott et toute la Ceinture Verte (ceinture végétalisée plantée au Nord-Est de Nouakchott pour stopper l’avancée des dunes qui menacent d’ensevelir les habitations de la ville) contre la construction d’un aéroport à trente kilomètres au Nord de Nouakchott destiné à accueillir jusqu’à deux millions de passagers par an.

Sans aucun appel d’offre et enfreignant toutes les règles et procédures de passation de marchés publiques, le contrat fut octroyé de gré-à-gré, à Najah for Major Works (NMW), entreprise novice dans le domaine et qui n’a pour elle que le fait d’appartenir à un certain Sahraoui.

Lancé en novembre 2010 et prévu pour être livré en vingt-quatre mois, l’Aéroport Oum Tounsi ne sera achevé qu’en juin 2016, soit avec quatre ans de retard.

Dans un pays à fonctionnement « normal », NMW aurait dû subir des pénalités de retard dès les premiers mois après novembre 2012. En place et lieu de ces pénalités, Sahraoui obtint une confortable rallonge de quinze milliards d’Ouguiyas (50 millions de dollars) que Aziz demande à la SNIM (Société Nationale Industrielle et Minière) de débourser. En prime à cette rallonge, le président de la République offre la garantie de l’Etat mauritanien pour appuyer cette transaction. A l’instar du contrat initial, cet important avenant ne suivit aucune procédure de passation de marché.

Il est très clair ici que Aziz tenait, à travers toutes ces acrobaties financières, à s’assurer le versement de sa côte part personnelle, en espèces sonnantes et trébuchantes.

Ce qui est sûr c’est que les quinze milliards de la SNIM n’avaient pas atterri dans les caisses de NWM ni servi à financer l’acquisition d’équipements pour l’aéroport Oum Tounsi. La preuve en est que Sahraoui continue à crier famine et à réclamer de la liquidité pour maintenir à flot sa trésorerie. L’argent de cette rallonge a certainement servi à irriguer les circuits occultes qui partent et aboutissent au Palais ocre.

Nous sommes en 2018, trois ans après le déblocage de la rallonge de la SNIM et deux ans après la réception du nouvel aéroport, la SNIM n’a pas vu la couleur de son argent. Nous apprenons, d’ailleurs, qu’un avenant supplémentaire stipulait, en guise de remboursement des quinze milliards, que Sahraoui devrait construire la grande mosquée qu’Aziz avait promise aux Nouakchottois et un immeuble de neuf étages (R+9) au profit de l’Etat mauritanien. La Grande mosquée était budgétisée, dans cet avenant, pour douze milliards d’Ouguiyas alors que quatre milliards sont largement suffisants pour la construire.

L’escroquerie

D’après nos informateurs, c’est, en grande partie, pour voler au secours de Sahraoui que Cheikh Ridha, avec la gourmande et intéressée bénédiction d’Aziz, se lança dans son aventure à la Bernard Madoff. Il fallait avoir de la liquidité, beaucoup de liquidité.

Les termes de cette escroquerie sont relativement simples. Ridha ouvre des « bureaux » commerciaux et annonce publiquement sa décision d’investir cinq personnes, triées sur le volet, qui seraient, seules, habilitées à s’engager en son nom. Les Bureaux de Ridha achètent des biens (Villas) à des prix plusieurs fois supérieurs à leur valeur sur le marché de l’immobilier. La condition de cette alléchante transaction est que le vendeur accepte de n’être payés qu’après un ou deux ans. Parfois avant même que l’ancien propriétaire ne vide la villa, le Bureau lui trouve un acquéreur qui accepte de l’acheter à un prix moitié de sa valeur sur le marché à condition, cette fois, de payer rubis sur l’ongle.

Ainsi les Bureaux de Ridha acquièrent de la liquidité immédiate, le font savoir sur le marché et augmentent, de la sorte, leur capacité d’endettement auprès d’éventuels propriétaires enclins à se séparer de leur biens. Très vite, les propriétaires commencent à affluer. Après l’immobilier, ce fut le tour du bétail, des voitures, des champs… Les premières échéances furent honorées par le flots de liquidité ou ce qui en restait après les ponctions faites aux profits de Sahraoui et de Aziz. Mais, très vite, la machine se grippa et ce fut la banqueroute reconnue sur les réseaux sociaux suivie de vaines promesses de remboursement, cette fois par les mines de phosphate de Bofal…

Le carré d’as

Avec AZIZ, Cheikh Ridha et Sahraoui, un quatrième larron vient fermer le carré d’as qui est entrain de faire main basse sur ce qui reste de la Mauritanie, il s’agit de Zein El Abidine Ould Mohamed Mahmoud dont le cas et l’appétit ont déjà fait l’objet d’un article de l’OBAMA.

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Il s’agit de cette étoile montante de la Mauritanie Nouvelle qui, partie d’un modeste magasin d’articles de bureautique, s’est retrouvée, du jour au lendemain, bénéficiaire de la plupart des contrats d’infrastructures de la République.

Après avoir mis à genoux l’ATTM et l’ENER, le voilà qui s’oriente vers le secteur de la banque et de l’industrie. Sa banque, la Banque Mauritanienne de l’Industrie(BMI), flambant neuve, s’est illustrée, à l’occasion du lancement de la Nouvelle Ouguiya (NUM), par la détention du record d’achat de coupons de cinq mille (5 000) NUM. En outre, on retrouve la BMI à tous les carrefours des schémas d’investissement des Emirats Arabes Unis en Mauritanie. Mais ce que les Mauritaniens ignorent et que nous sommes en train de documenter à l’OBAMA c’est l’accélération de la fréquence des voyages de la famille et de l’entourage immédiat de Ould Abdel Aziz vers les Emirats. Le Président, la Première Dame, les filles, les gendres et la plupart des prête-noms présidentiels ont été vus, ces derniers temps, dans cet Etat du golf. Ils y ont acquis propriétés et intérêts économiques en tout genre. En fait les fameux investisseurs émiratis qui frappent à la porte de notre pays ne seraient autres que les Al Aziz qui, après l’avoir blanchi sous le soleil du Golf arabique, nous ramènent l’argent qu’ils avaient accumulé pour le faire fructifier à portée de leurs mains.

Les interrogations

De nombreuses interrogations continuent à s’imposer à nous au vu des derniers développements:

1- Est ce que les épargnants mauritaniens, qui ont été floués par Cheikh Ridha avec la complicité active de Ould Abdel Aziz, ont la moindre chance de récupérer une partie de leur dû? Le fait que personne n’ait osé porter plainte contre le Cheikh escroc en dit long sur le degré d’impunité dont jouit ce triste personnage.

2- Y’aurait-il un lien entre l’accumulation des dettes par Cheikh Ridha, la mise en circulation de la Nouvelles Ouguiya et l’octroi d’un délai d’un an pour retirer les anciens billets et les détruire?

3- Aziz a organisé la mise en faillite frauduleuse de la SONIMEX, l’ATTM et de l’ENER et s’évertue à faire disparaître toutes les pièces à conviction liées à ces entreprises qui lui ont servi, ces dernières années, à détourner, par le truchement des contrats de construction et de maintenance des infrastructures routières, des milliards d’Ouguiyas. Nous pensons à l’OBAM qu’il y a là une manifestation supplémentaire de l’atmosphère de fin de règne et un signe additionnel de fébrilité de la part du Chef de l’Etat. Mais nous rassurons nos concitoyens en leur réaffirmant que les temps de l’impunité sont maintenant révolus et que même en renonçant à un troisième mandat, Aziz sera poursuivi.

4- Nous sommes étonnés devant le silence assourdissant qu’observent nos élites intellectuelles et politiques devant ces opérations de pillage systématique de nos richesses de la part d’escrocs de tous genres opérant au vu et au su de tout le monde.

L’OBAMA remercie les patriotes qui, au risque de perdre leur gagne-pain, continuent à nous informer depuis l’intérieur de la forteresse administrative. La patrie vous le rendra.

Source:biensetavoirsmalacquis.blogspot.fr

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