Winnie Mandela, figure de la lutte anti-apartheid durant 25 ans, personnalité tempétueuse des townships d’Afrique du Sud et ancienne épouse de Nelson Mandela est décédée lundi 2 avril à l’âge de 81 ans.

C’est une vie tumultueuse. Celle d’une femme au nom symbole entre tous de lutte contre l’apartheid. Mais au prénom irrémédiablement entaché par une suite d’affaires et de scandales, sanctionnés à plusieurs reprises. De Winnie Mandela, née le 26 septembre 1936, décédée lundi 2 avril à Johannesburg à l’âge de 81 ans, on préfère d’abord retenir une histoire d’engagement.

Celui de Nomzamo Winifred Zanyiwe Madikizela, dite Winnie, première assistante sociale noire d’Afrique du Sud, officiant depuis 1955, qui épouse à 22 ans l’avocat Nelson Mandela, avant de devenir elle-même, en 1962, un symbole de combat.

Nelson derrière les barreaux à Robben Island, sa jeune femme et mère de leurs deux filles, Zenina et Zinzi, se démène pour obtenir sa libération. Elle passe 17 mois en prison, en 1969 et 1970. Brutalisée, violentée, assignée à résidence, elle devient une figure du Congrès national africain (ANC). C’est après que l’histoire dégénère. En 1980, après des agressions répétées, elle arbore le treillis et s’entoure de gardes du corps qu’elle va chercher dans les bidonvilles. Ces jeunes formeront le Mandela United Football Club (MUFC), une milice qui commet toutes sortes d’exactions. En 1988, quatre jeunes d’un foyer méthodiste soupçonnés d’être des informateurs de la police sont enlevés et torturés dans sa maison. Trois sont libérés, mais le jeune Stompie Seipei, 14 ans, est retrouvé assassiné.

Elle troque le treillis pour la tenue traditionnelle

Winnie est poursuivie pour complicité d’enlèvement et de meurtre. Lorsque Nelson Mandela sort de prison en 1990, elle figure encore à ses côtés. Mais l’homme de tout un peuple la quitte en 1992. Séparée, elle troque le treillis pour la tenue traditionnelle. En 1994, elle est nommée par son mari vice-ministre des arts, puis renvoyée pour insubordination. En 1996, le divorce est prononcé. Elle décide de garder son nom, et réclame la moitié du Prix Nobel de la Paix de son ex-époux, qu’elle n’obtiendra pas.

La suite ? Une pente continue : en 1998, la Commission vérité et réconciliation la déclare « coupable politiquement et moralement des énormes violations des droits de l’Homme » commises par le MUFC. En 2001, la voilà condamnée à six ans de prison pour le meurtre de Stompie Seipei. Elle n’écopera que de 3 000 € d’amende. En 2003, enfin, la voilà inculpée pour 60 chefs d’accusation de fraude et 25 chefs pour vol…

En 2009, elle fait un retour en politique auprès de Jacob Zuma qui brigue la tête du pays. L’admiration que lui portent les électeurs des anciens ghettos noirs et pauvres sert l’ANC. En 2014, après la mort de Nelson Mandela en décembre 2013, elle choisit de supporter Julius Malema, l’adversaire de Jacob Zuma dont elle dénonçait encore la corruption en septembre 2017. Jusqu’au bout, l’insoumission. Trait de caractère principal de celle que Desmond Tutu a salué, lundi 2 avril, la qualifiant de « symbole majeur » de la lutte anti-apartheid.

Victoria Tassel et Jean-Yves Dana
Source:la-croix.com

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